Avec une aussi belle brochette d’acteurs et un scénario aussi beau que celui qu’Agatha Christie avait écrit en 1934, on aurait pu s’attendre à un grand moment de cinéma, un suspense insoutenable et un dénouement des plus inattendus ! Détrompez-vous, Le Crime de l’Orient-Express pâtit malheureusement de nombre de défauts qui gâchent le film.

 

Alors oui, c’est un film qui s’appuie énormément sur son côté esthétique et visuel (heureusement dirons-nous). Le réalisateur Kenneth Branagh nous offre ici de magnifiques plans dont le plan-séquence déjà vu dans la bande-annonce qui ne perd toutefois pas de sa superbe dans le film. Bien que peu réalistes, les décors sont très soignés, baignés d’une douce lumière orangée qui rend l’atmosphère du film plutôt apaisante… et c’est à mon goût une erreur de la part du directeur de la photographie. N’oublions pas, nous sommes dans un film policier à suspense : un meurtre vient d’être commis dans un wagon de l’Orient-Express, tout le monde est suspect ! L’ambiance devrait être beaucoup plus froide, tendue et moins joviale et feutrée. Comme on pourrait le reprocher à beaucoup de films américains, on a l’impression que tout est lissé, aseptisé au détriment d’une atmosphère beaucoup plus pesante qui aurait, selon moi, beaucoup mieux convenu au film. On a encore une fois la sensation que beaucoup de films d’aujourd’hui n’arrivent pas à faire un choix entre la comédie et le drame : vouloir mêler les deux est beaucoup trop délicat et souvent assez peu réussi et Le Crime de l’Orient-Express ne viendra pas contredire la règle…

 

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On regrette également que dans un film à suspense, il n’y ait pas plus de suspense. Dès les premières minutes du film, des petites séquences nous mettent trop rapidement la puce à l’oreille. Trop d’indices sont révélés trop rapidement, le film se prête beaucoup moins à la recherche du coupable que le livre de par son rythme. Si vous avez lu le livre, évidemment le suspense est déjà perdu mais si vous ne l’avez pas lu, vous n’en aurez malheureusement pas non plus… Les personnages sont assez décevant autant dans leur profondeur que dans leur interprétation. L’histoire de chacun n’est à mon sens pas assez creusée et on a plutôt l’impression d’avoir devant soi des portraits caricaturaux que de véritables personnes avec leur histoire propre et leur vécu. Et en écho, les acteurs livrent également une performance peu satisfaisante : pour ne citer que lui, Johnny Depp donne une vision bien trop étriquée d’un gangster effrayé dont on ne connaît pas les motivations, les peurs et qui semble donc assez creux. Je noterais toutefois que Kenneth Branagh est plutôt attachant en tant qu’Hercule Poirot : on sent un peu plus de profondeur et de conviction dans son interprétation que dans celle des autres personnages. Le film aurait donc peut-être gagné à être joué par des visages bien plus anonymes (on regrette notamment que la talentueuse Olivia Colman qui avait été si bouleversante dans Broadchurch ne soit pas plus mise en valeur).

 

En conclusion, je dirais que Le Crime de l’Orient-Express illustre les nombreux défauts des films et séries policières qui inondent nos télévisions : beaucoup trop d’humour, pas assez d’angoisse. Alors peut-être est-ce là une volonté de rendre le film plus grand public mais apparemment au détriment de sa qualité… A défaut d’être un chef d’œuvre à cause d’un scénario qui ne passe pas aussi bien à l’écran que sur le papier, Le Crime de l’Orient-Express a le mérite de faire revivre un Hercule Poirot attachant et de faire découvrir l’originalité des intrigues des romans d’Agatha Christie à des générations plus jeunes.